Régie par le code de l’environnement et introduit à l’occasion du Grenelle II de l’environnement en 2010, le bilan carbone est un outil dont le cadre a subi plusieurs évolutions au fil de ces dernières années parfois difficile à suivre.
Le bilan carbone permet de comptabiliser les émissions de gaz à effet de serre liées à toutes les activités d’une organisation et son bon fonctionnement.
Depuis le 1er janvier 2023, le cadre règlementaire a été élargi, une occasion pour revenir sur les différentes évolutions concernant le bilan carbone et d’expliquer les nouvelles évolutions.
12 juillet 2010 , la Loi Grenelle II : un diagnostic des gaz à effet de serres pour des mesures correctives
Ce texte permet de décliner de manière concrète les orientations du Grenelle I de 2009 et détermine les objectifs du gouvernement dans le domaine environnemental.
Il demande à environ 5000 acteurs publics et privés de réaliser un diagnostic de leurs émissions de gaz à effet de serre sur une année en vue d’identifier et de mobiliser les actions de réduction de ces dernières.
11 juillet 2011, décret n° 2011-829 : la formalisation des lignes directrices au sein du code de l’environnement
Le décret de 2011 intègre au sein du code de l’environnement une section intitulée : « Bilan des émissions de gaz à effet de serre et plan climat-énergie territorial » précisant les acteurs concernés, le périmètre de la comptabilité des GES et introduisant la nécessité d’accompagner un plan d’action mesurable et réalisable pour contribuer à la réduction des émissions de GES.
La définition de 3 périmètres de comptabilisation : scope 1, 2 et 3
Périmètre obligatoire :
- Scope 1 : émissions directes (toutes les émissions émises au sein de la société dans le but de fournir le produit ou le service)
- Scope 2 : émissions indirectes liées à la consommation d’électricité, de chaleur et de vapeur (toutes les émissions émises en dehors de la société liée à l’énergie)
Périmètre non obligatoire :
- Scope 3 : autres émissions indirectes (toutes les autres émissions émises en dehors de la société dont les activités servent au bon fonctionnement de l’entreprise)
Qui est concerné ?
- Entreprises de plus de 500 salariés en métropole / 250 en outre-mer
- Collectivités de plus de 50 000 habitants
- Autres personnes morales publique employant plus de 250 salariés
17 août 2015, article 167 de la loi n° 2015-992 : les prémices d’une règlementation plus incitative à travers un dispositif établi
Ce nouvel article s’attache à la traçabilité des bilans carbone et introduit pour la première fois une mesure incitative pour la responsabilisation des acteurs privés et publiques. Les fréquences et la méthode de dépôt y sont clairement introduit.
Aussi, la réalisation du bilan carbone est obligatoire tous les 4 ans pour les entreprises et tous les 3 ans pour les collectivités
L’article spécifie la création d’une plateforme digitale développée par l’ADEME pour récolter l’ensemble des bilans carbone des acteurs concernés à partir de 2016 sous peine d’une sanction financière de 1 500€.
8 novembre 2019, la loi n°2019-1147 : Un accent mis d’avantage sur les actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Cette loi apporte à nouveau des modifications concernant la réalisation des Bilans GES règlementaires :
⦁ Le plan d’action est remplacé par un plan de transition, qui précise son contenu.
⦁ Les collectivités peuvent intégrer leur Bilan GES dans le Plan Climat Air Energie Territoire2 (PCAET) qui les couvre et être ainsi exonérées de sa publication séparée.
⦁ Les entreprises soumises à la Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF) peuvent être dispensées de l’élaboration du plan de transition si les informations correspondantes figurent dans cette déclaration.
⦁ La sanction maximale en cas de non-réalisation est portée à 10 000 euros, et 20 000 euros en cas de récidive, contre 1 500 jusqu’à présent.
1er juillet 2022, décret n° 2022-982 : un périmètre plus pertinent, une volonté de transparence et une vision sur le long terme.
Depuis le 1er janvier 2023, des nouvelles directives sont applicables concernant la réalisation du bilan carbone en application du décret signé par Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, le 1er juillet 2022
Les évolutions induites par le décret :
- Le périmètre est élargi à l’ensemble des émissions directes et des émissions indirectes significatives.
- Plan de transition obligatoire
- Nouvelle nomenclature des émissions pour plus de précision
Un périmètre élargi permettant une comptabilisation plus réaliste
Les scopes 1 et 2 sont donc rejoints par le scope 3 représentant les émissions indirectes jusqu’alors non obligatoire.
Précision importante : le texte fait référence aux émissions indirectes significatives : les entreprises ont donc l’obligation d’inclure dans leur bilan carbone au minimum 80% du Scope 3.
Il sera donc toujours possible d’exclure certains postes du scope 3 dans la réalisation de son bilan carbone mais dans une certaine limite.
Une phase de sélection des postes d’émission du scope 3 sera donc à prévoir. Ce choix peut être couplé avec d’autres critères tels que :
- Niveau d’influence : la mesure dans laquelle l’organisme peut surveiller et réduire les émissions et les suppressions
- Importance stratégique et vulnérabilité : concerne les émissions ou suppressions indirectes qui contribuent à l’exposition de l’organisme aux risques
- Lignes directrices : émissions jugées significatives pour le secteur
- Sous-traitance : émissions et suppressions indirectes résultant d’activités externalisées
- Engagement du personnel : émissions indirectes susceptibles de motiver les employés à réduire leurs émissions
Un plan de transition ambitieux avec des objectifs sur différents horizons
Le bilan des émissions de gaz à effet de serre doit être accompagné d’un plan de transition dont les objectifs sont stipulés. Sa fréquence de réalisation est la même que le dépôt du Bilan carbone : tous les 4 ans pour les entreprises. Cela permet donc de coordonner la réalisation de leur bilan d’émissions de gaz à effet de serre avec le plan de transition.
Comme mentionné précédemment, le plan de transition doit dorénavant inclure des objectifs de réduction quantitatifs sur deux axes.
- pour le moyen terme, c’est-à-dire à une échéance correspondant à la période de leur prochain bilan
- pour le long terme, c’est-à-dire par exemple aux horizons 2030 et 2050 en cohérence avec les point d’étapes de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
Une nomenclature plus précise pour une meilleure compréhension du bilan carbone
Enfin, la dernière évolution concerne la nomenclature des postes d’émissions en intégrant 3 nouvelles catégories, permettant ainsi une meilleure compréhension pour tous les acteurs.
On voit ainsi apparaitre clairement les catégories suivantes anciennement rassemblées dans la catégorie « autres émissions indirectes » :
- Émissions indirectes associées au transport
- Émissions indirectes associées aux produits achetés
- Émissions indirectes associées au produits vendus
Derrière ces évolutions se cachent une volonté du gouvernement pour plus de transparence concernant les émissions de gaz à effet de serre des organisations. En effet, l’intégration de minimum 80% du scope 3 marque un tournant permettant d’avoir une visibilité plus réaliste des émissions de GES des organisations.